Un petit compte rendu du concert dans le cadre de "J'entends des Voix" sur Sun Ship :
"Le secret de ces rencontres, de ces trios de musiciens impliqués et allant au devant des risques que comporte cette improvisation spontanée, c'est la cohésion, l'empathie, la complicité entre les musiciens. (...) Le trio présenté hier s'inscrit dans cette logique, mais le minimalisme a fait place à la densité, chacun apportant à l'édifice un groove intime et personnel. En premier lieu, Antoine dans son rapport charnel au piano fait de caresse et de détors, usant d'objets et d'audace pour redonner au piano son existence primale : celle d'un objet percussif à cordes que relaye la douceur acidulée d'une Sylvaine Hélary qui souffle une chaleur constructive dans ses tubes en métal, chante et trille en même temps et semble voltiger au milieu des sons, des souffles et craquements. Elise Dabrowski quant à elle joue en carnation subtile, fait corps à corps avec une contrebasse -quelle technique à l'archer !- qui semble elle aussi déborder de vie, et chante comme en elle même pour lui donner langage."
Les routes qui se croisent ne sont pas toujours des longues lignes droites grises au milieu des labours, des flaques, et des marnières. Il n’y a pas forcément de panneau stop aux intersections ni de gendarmes dans les parages. Celles qui réunissent Sylvaine Hélary, Antoine Berland et Elise Dabrowski sont sylvestres et serpentent, courent le nez au vent avant de se croiser au bonheur d’un carambolage de sons, de chaleurs, d’idées et d’atmosphères.
Si ces trois là passent sans même se consulter des récifs du Jazz aux rivages de la Contemporaine, c’est qu’ils se retrouvent chacun au point convergeant d’histoires musicales disparates : Antoine Berland, son piano et ses brosses à dents ont découvert Ligeti avant Deep Purple, et il s’ingénie désormais à les faire se rencontrer par des passages secrets dont lui seul à la clé. Elise Dabrowski a fait danser sa contrebasse avec Stravinsky avant de la dévergonder auprès du jazz brûlant de Médéric Collignon… Sylvaine Helary a soufflé dans sa flûte dans le rock et le Hip-Hop tout en trillant chez Monniot et Lubat avec la même verve et cette candeur avisée dont elle fait ses chorus. Ces trois là ensemble écrivent une histoire musicale faite de chaloupement et de dérivation, de surprise et d’espérance…
